Philosophica: International Journal for the History of Philosophy

La religion, comme manifestation de la rationalité, participe, dans la Modernité, des vicissitudes de la rationalité elle-même qui se définit souvent en rapport, pas toujours pacifique, avec la religion, surtout avec le christianisme dans la culture occidentale. Il est légitime de parler tant d’une immanentisation naturaliste de la religion que d’une christianisation de la raison. La découverte du Nouveau Monde a stimulé ce double mouvement.

The paper deals with the representation of otherness in 18th Century Germany. Departing from an episode narrated in Georg Forster’s account of James Cook’s second voyage around the world, attention is paid to the way in which an uncanny experience for Europeans - eating dog food - is narrated, and translated according to European discursive premises. The analysis of Forster’s considerations on the relativity of customs, on what is to be attributed to nature or culture, on what is to be considered innate or acquired provide the departing point for the reconstruction (and questioning) of strategies of representing of otherness. In the following parts, diverse ways of representing otherness are briefly analyzed (anatomical studies, collections of bodies and artifacts in natural history cabinets) and emphasis is put on the way in which non-European peoples are always ultimately the object of a process of reification. The scientific implications of Contemporary debates on race are also taken into account, namely the controversy between Georg Forster and Kant. The tension between ethnographie empiricism (Forster) and anthropological rationalism (Kant) is stressed and brought onto relation with the Enlightenment discourse on the “Other”. The conclusion focuses on the limits and utopian possibilities of the Enlightenment discourse, by juxtaposing it to the critique of Western rationalism as proposed by postcolonial studies.

On étudie ici la diversité des conceptions théoriques qui ont guidé les rencontres des Portugais, au XVIème et XVIIème siècles, avec les peuples de l’Afrique et du Brésil, soit de la part de ceux qui reconnaissaient la légitimité de l’esclavage, soit de la part de ceux qui ont essayé une limitation juridique de celle-ci. Le sujet principal de cette étude est, donc, la réflexion portugaise sur la diversité humaine.

Nous essayons de mettre en évidence l’articulation entre l’image et l’expérience de l’espace et du monde dans la pensée mythique et visionnaire et dans la nouvelle rationalité qui s’origine avec les Découvertes ibériques. La valeur de dévoilement du Réel du voyage initiatique vers l’au-delà du monde empirique se transfère vers la découverte maritime des nouveaux mondes physiques et culturels. La démythification des espaces intemporels s’associe avec la mythification du Nouveau Monde de l’expérience historique et scientifique et l’échec de ces expectatives conduit à la formulation des utopies modernes, où on rencontre un imaginaire analogue à celui du voyage initiatique. On se demande si en tout ce procès il n’y a pas quelque chose qui s’oublie...

Les Redondilhas de Luís de Camões constituent un exemple significatif de ce “théâtre de la mémoire”, au sens large, qui a connu au XVI ème siècle son moment le plus mûr et de plus grande diffusion. On y trouve un ensemble de variantes mnémotechniques, de schèmes de la rhétorique sacrée et profane, de jeux qui produisent des textes et des textes qui produisent des jeux. On y trouve aussi un spécial rapport entre mot et image, entre contenu et expression, qui offre, même en sens ésotérique, une importante clé de lecture pour l’ensemble de l’époque. Entre le labyrinthe des mots et l’ordre de la bibliothèque, la poétique de la mémoire représente une poésie qui pense le futur tout en réinventant le passé.

Dans cet article on fait une recension de l’important rôle des missionnaires portugais dans la création des bases qui ont rendu possible le dialogue interculturel des peuples européens avec les peuples de l’Orient et du Nouveau Monde, notamment à travers l’étude des langues natives des peuples avec lesquels ils ont été en contact depuis les premiers siècles des Découvertes. Ce dialogue par le moyen des langues, qui a constitué la première rencontre entre la culture européenne et les cultures orientales, est suffisamment démontré par l’histoire et la description des traditions, des religions et des idéologies du Nouveau Monde, qui ont ainsi élargi les perspectives culturelles du «nouveau monde de la raison européenne», un procès qui non seulement se maintient mais ne cesse de s’intensifier dans l’actualité.

Ce bref article se donne comme but de présenter une introduction à la culture portugaise des Découvertes, laquelle représente une des manifestations par excellence da la Renaissance portugaise. On commence par intégrer cette culture dans le cadre des programmes intellectuels et savants de l’époque, pour suivre ensuite les caractéristiques, les oeuvres et les figures des différents champs discursifs où elle se déploie. Finalement, on cherche à évaluer la culture portugaise de la période qui va du milieu du XV.ème au début du XVII.ème siècle à la lumière des réseaux de continuité et de discontinuité de ce temps qui l’a vu naître et se développer.

La controverse du péché philosophique (1686-1690) est un épisode remarquable du conflit entre les Jésuites et le cercle janséniste de Port-Royal, où Antoine Arnauld pontifiait. Le différend en question a été décidé dans les instances théologico-écclésiastiques convenables, mais il déborde largement le domaine de la théologie, en se répercutant sur le caractère de la rationalité européenne et sur le mode du rapprocheme nt entre l’Europe chrétienne et les cultures des peuples qu’on vient de découvrir. Le noyau de ce débat se place au niveau anthropologique, en ce qui concerne la dignité de la nature humaine et sa perfectibilité. Dans cette étude, on essaie de donner le cadre général dans lequel le débat se déploie, les enjeux qui s’y posent et le légat qui est transmis à l’avenir, notamment à l’iluminisme du XVIIIème siécle.

L’extrordinaire essor de l’intérêt anthropologique, que la seconde moitié du XVIIIème siècle a connnu dans des domaines aussi différents que les sciences de la nature ou les études géographiques et ethnologiques, a demandé à la philosophie d’élaborer, de sa part, de nouvelles bases théoriques et conceptuelles pour l’établissement d’une réflexion sur l’homme désormais libérée de l’abstraction et des dualismes de la pensée métaphysique et théologique précédente. Les notions de nature humaine et de genre humain ont permis a la philosophie de parvenir à une vision concrète et dynamique, surmontant la clôture des anciennes définitions de l’être humain comme “animal rationel” ou “image de Dieu”. Dans cet article on cherche à saisir ce mouvement d’un “adieu à l’essence” en anthropologie philosophique, en suivant les conceptions de perfectibilité dans le Discours sur l'inégalité de Rousseau, de culture dans l'Essai sur l'origine du langage de Herder et de caractère dans l’Anthropologie pragmatique de Kant.

The common ground and dissimilarities in the reciprocal influence between two apparently identical concepts in the Contemporary western political tradition - freedom and liberty - are dealt in this paper. The author tries to tackle the interrelated genealogy both of freedom and liberty categories, in the long period opened by the English Civil War and closed by the conflicting reactions to the French Revolution. The sovereignty concept on the other hand allows the reader to understand the ongoing dynamic of the crucial philosophical relationship of these two central concepts.

L’image du voyage en haute mer a été toujours une des plus expressives métaphores de la condition humaine dans son essentielle inconstance et insécurité, et l’humaniste Érasme de Rotterdam l’a bien recensée dans son adage «in eadem sumus navi». Mais depuis la Renaissance et après les voyages océaniques qui ont amené Christophe Colomb à la découverte du Nouveau Monde, le voyage par mer a acquis, dans le discours de quelques philosophes, la fonction d’une métaphore féconde pour dire l’aventureuse expérience des découvertes scientifiques et philosophiques, comme si il s’ouvrait devant la raison un inépuisable nouveau monde de connaissances qu’il faudrait découvrir par l’heureuse combination de l’audace, de l’intelligence et de la bonne fortune. En suivant le cours de la métaphore, l’essai montre son divers fonctionnement rhétorique dans l’oeuvre de quelques penseurs modernes, tels que Francis Bacon, Emmanuel Kant et le jésuite portugais du baroque António Vieira.